1. Introduction
L’exploration sismique est une méthode géophysique dont le but est d’imager la subsurface en utilisant un champ d’onde artificiel. L’énergie sismique remontée en surface est enregistrée par des géophones. Un film sismique est composé de plusieurs traces, il contient des hyperboles de réflexions réfléchies sur les interfaces des couches géologiques et d’autres signaux indésirables constituant le bruit (Al-Anezi et al., 2013). Durant l’étape de traitement et notamment lors de la sommation, de la déconvolution et de la migration, de nombreux évènements indésirables sont atténués (Loge & Mary, 2021).
Typiquement, il existe deux sortes de bruit, l’un est dénommé bruit cohérent et l’autre incohérent, ou encore aléatoire. Le principe du filtrage consiste à dissocier le bruit du signal utile ou d’isoler certains détails du traitement de l’image (Bergounioux, 2015).
La couverture multiple constitue un outil efficace pour se débarrasser du bruit aléatoire. Les filtrages F-X et F-K, sont les plus utilisés en traitement sismique afin d’éliminer des bruits et des multiples.
De nombreux auteurs ont effectué des recherches sur les techniques et les méthodes relatives au filtrage des ondes de surfaces entre autres: le Ground-roll attenuation based on Wiener filtering and benefits of time-frequency imaging (Karsli & Bayrak, 2008) et le Ground Roll Attenuation via SVD and Adaptive Subtraction (Cary & Zhang, 2009). Dans leur travail, ces auteurs ont utilisé la décomposition en valeur singulière avec une fenêtre de localisation dans le domaine espace-temps afin d’estimer le ground roll, l'adaptive seismic ground roll attenuation using the double density dual tree discrete wavelet transform (DWT) method (Goudarzi & Ali Riahi, 2012); Ground roll attenuation using shaping filters and band limited sweep signals (Dos Santos & Porsani, 2012). Cette technique de filtrage a été appliquée pour l’atténuation des bruits affectant les enregistrements sismiques en exploration pétrolière, Medium-scale resonant wave barrier for seismic (Zeighami et al., 2021); Seismic ground-roll noise attenuation using deep learning (Kaur et al., 2020 ); Physics-constrained deep learning for ground roll attenuation (Pham & Li, 2022) et plus récemment, nous pouvons citer l’article de Xiao et al (2022) dont l’étude a portée sur le Ground Roll Attenuation of Multicomponent Seismic Datawith the Noise-Assisted Multivariate Empirical Mode Decomposition (NA-MEMD).
L’objectif principal de ce travail consiste en premier lieu à proposer l’application du filtre Surface Wave Noise attenuation (SWNA) dans le but d’atténuer le ground roll et améliorer la qualité de l’imagerie sismique sur des données sismiques synthétiques et réelles, obtenues avant et après sommation. Nous avons aussi utilisé des filtres à base d’image, à savoir le filtre médian et le filtre gaussien, de manière à réduire le bruit résiduel, ce qui a permis de mettre en évidence la structure géologique de la subsurface avec une qualité sismique acceptable.
Le contexte géographique de la zone d’étude correspond au bassin d'Illizi, localisé dans la plateforme saharienne de l’Algérie, à 1600 km au sud-est d’Alger, une latitude Nord allant de 25°à 29° et une longitude Est variant de 6°à10°, couvrant une superficie d'environ 108424 km2. Le bassin sédimentaire d’Illizi est délimité au Nord par le bassin de Berkane, au Sud par une portion du massif du Hoggar et à l’Est par le môle d’Amguid suivi aux confins Est par la ride de Tihemboka.
Le contexte géologique porte sur des sections sismiques relatives au bassin sédimentaire d’Illizi, dans l’extrême Sud Est de l’Algérie. Il s’agit d’un vaste domaine sédimentaire stable, en situation intra cratonique (Fabre, 1976). Le remplissage du bassin correspond à des faciès allant du Paléozoïque au Mésozoïque avec des sédiments essentiellement silico-clastiques, carbonatées ou localement évaporitiques. Les rejeux d’accidents panafricains ont conduit à conférer à la région une structure à grande rayon de courbure.
Les ondes de surface. Les ondes de surface, appelées aussi ground roll bien qu’elles soient utiles en géotechnique et autres domaines (Moya-Gutiérrez et al., 2020), elles constituent des parasites en prospection sismique. Leur génération est attribuée à l'hétérogénéité des terrains. Lors de leur passage au voisinage de la surface, les particules sont soumises à une combinaison de mouvements longitudinaux et transversaux causés par l’interférence des ondes P et S dont l'amplitude diminue en fonction de la profondeur (Telford et al., 1990 ; Yilmaz, 2001). Ces ondes de surface sont connues sous le nom d’onde de Rayleigh et ondes de Love, elles constituent une source de bruits indésirables dans l'enregistrement sismique et qu'on tente généralement d'atténuer pour une meilleure exploitation des données sismiques. Le ground-roll se propage à vitesse relativement faible (150 à 1500 m/s) dépendant de la longueur d’onde et de l’épaisseur du milieu traversé par le champ d’onde, avec un caractère de basse fréquence (Dubois & Diament, 2001).
Le filtre surface wave atténuation. Le Filtre Surface Wave Attenuation, SWNA, atténue les ondes de surface par la formation des grilles de traces sismiques à basses fréquences (Low-frequency Arrays). Les logiciels commerciaux offrent une exploitation interactive de ce filtre.
Connaissant la vitesse de l’onde de surface ainsi que sa fréquence de coupure, le programme SWNA transforme les données sismiques du domaine espace-temps au domaine fréquence-espace, où il effectue un assemblage dépendant de la fréquence des traces adjacentes. Pour chaque fréquence, le nombre de traces à mélanger (mix) est déterminé par la relation suivante:
mix = V / (F * ∆X)
V: la vitesse de l’onde, F : la fréquence et ∆X : l’intertrace.
Une section sismique est fonction des variables du temps et de la distance. La transformée de Fourier en 2D d’une fonction S(t,x) est (Bo et al., 2019):
Après l’opération du filtrage, le retour au domaine temporel est réalisé par la transformée de Fourier inverse exprimée par:
Les composantes ayant des fréquences supérieures à la fréquence de coupure restent inchangeables. Finalement, les données filtrées sont transformées inversement au domaine temps-fréquence.
Le programme SWNA opère en panneaux, qui se superposent et se fusionnent.
Chaque panneau peut contenir des traces qui ont les dimensions de ce panneau (Panel seize traces). Les premières et dernières traces de bord de panneau chevauchent les panneaux adjacents. Dans les bords du panneau, les traces de mélange de panneaux provenant de panneaux adjacents sont mélangées et sorties alors que les traces restantes aux bords sont annulées.
2. Méthodologie
2.1. Applications sur des données synthétiques
La trace synthétique joue un rôle important dans la création d’un modèle sismique pour tester l’effet d’un filtre. Dans ce travail, nous avons testé l’algorithme du filtre IACDD sur un film synthétique. Pour cela, nous avons supposé un modèle composé d’un ensemble de couches inclinées à partir duquel une mini section sismique était générée, elle est composée de 32 traces distantes de 25 m, l’une de l’autre.
Le sismogramme est obtenu après convolution de la série des coefficients de réflexion avec l’ondelette de Klauder. Dans notre cas, la longueur du sweep est de 5000 ms, l’intervalle fréquentiel du balayage du sweep est de 12-72 HZ. En ajoutant le bruit organisé à la section sismique, on obtient une image composée à la fois du signal et du bruit valable pour le test du filtre proposé (Fig. 1.a).
En dépit de la connaissance préalable des paramètres du bruit (vitesses et fréquences), une partie du bruit, en cercle bleue, n’a pas été atténuée.
Comme nous l’avons souligné auparavant, une importante partie du ground roll affectant la section sismique synthétique est atténuée par le filtre SWNA (Fig. 1.b). Cependant, la connaissance préalable des paramètres du bruit (vitesses et fréquences), une partie du bruit résiduel, en cercle bleue, n’a pas été atténuée mais la qualité du document final reste acceptable.
2.2. Application sur des données sismiques réelles
Pour un choix optimal des paramètres du filtre SWNA, nous avons identifié le ground roll sur un tir sismique brut (Fig. 2.a) en mesurant les différentes vitesses correspondantes. La gamme fréquentielle du ground roll est obtenue dans le domaine spectral par la transformée de Fourier bidimensionnelle après la mise à zéro (mute) des autres évènements sismiques dans le domaine temporel. La Fig. 2.b illustre le tir précédent, filtré par le filtre SWNA où nous constatons qu’une bonne partie du ground roll est filtrée (rectangle en rouge) laissant apparaître les hyperboles de réflexions d’une façon meilleure.
En outre, le filtre SWNA a été appliqué sur une portion de section sismique sommée en couverture multiple, enregistrée dans le Sahara du Nord de l’Afrique. La distance entre géophones est de 25 m, l’inter-tir (shot interval) est de 25 m, la section brute finale est constituée approximativement de 300 traces avec une distance entre CDP (Common Deep Point) de 12.5 m, le temps d’écoute total est de 400 ms. Les données sont rééchantillonnées à 4 ms après traitement afin d’alléger la taille des données et économiser l’espace mémoire. La longueur du sweep vibro sismique, utilisée durant l’étape d’acquisition est de 8-72 HZ avec un temps de balayage de 12000 ms, paramètres utilisés généralement pour l’imagerie des structures peu profondes. L’ordre de la couverture est de 120 % où chaque trace sommée est obtenue après une correction statique réfraction et correction dynamique et après avoir effectué une analyse des vitesses. La section sismique brute est représentée par la Fig.3.a.
Bien que la procédure de sommation en couverture soit multiple, un fort bruit aléatoire subsiste toujours sur la section sismique, associé à une faible continuité latérale.
3. Résultats et discusión
De nombreux travaux ont fait l’objet de l’interprétation des sections sismiques après filtrage (Ferahtia et al., 2013). Pour montrer l’efficacité du filtre utilisé, de nombreuses gammes de vitesses et fréquences ont été testées sur la section sismique proposée.
Quelques réflecteurs sismiques sont renforcés et apparaissent d’une façon meilleure après application du filtre SWNA (Fig. 3.b). Dans le cas d’un modèle géologique simple, on distingue deux types de déformations, le style souple et le style cassant.
La déformation souple, représentée sur la section sismique, reflète des anticlinaux et des synclinaux apparaissant d’une façon meilleure après filtrage. A titre d’exemple, l’anticlinal localisé entre 0 et 400ms et entre 100 à 200 en CDP où sa partie profonde est dissimulée par le bruit, commence à apparaitre après l’application du filtre SWNA. On peut citer un autre cas, celui du paquet localisé entre 150 et 400 ms selon l’échelle verticale et entre 200 et 650 en CDP, pour l’échelle horizontale, la qualité sismique après filtrage de celui-ci est acceptable dans son ensemble.
En statistique, l’erreur quadratique moyenne ou RMS (root mean squart) est une valeur typique pour un nombre (n) de valeurs de quantités (x1, x2, x3…), elle est donnée par l’expression suivante (Bhuiyan & Khan, 2018; Jakhetiya et al., 2018):
Cette métrique est souvent utilisée en traitement sismique de manière à comparer le niveau de bruit à l’intérieur d’une fenêtre temporelle. Les graphes de la figure 4.a montrent les niveaux RMS (RMS level) de la section sismique non filtrée (en rouge), insuffisamment filtrée (en noire), alors que le graphe en bleu représente le niveau RMS de la section sismique après l’application du filtre SWNA. Il est évident que le filtrage diminue le niveau RMS à cause de l’atténuation du niveau du bruit sismique présent dans la section. Un agrandissement entre les canaux 100 et 200 (Fig. 4.b) illustre d’une façon plus claire la différence entre le niveau RMS avant et après filtrage des ondes de surface.
Atténuation des bruits résiduels. En traitement des données sismiques, on utilise une série des filtres non seulement pour atténuer dans la mesure du possible les bruits présents sur une section sismique mais aussi pour améliorer la qualité du signal sismique. Afin d’atténuer le bruit résiduel de la section filtré par le filtre SWNA (Fig. 3.b), deux filtres ont été appliqués, le filtre médian et le filtre gaussien.
Filtre médian. Le filtre médian a été introduit par Tukey (1974), il est basé sur un critère statistique (valeur médiane) et est considéré comme étant l’un des plus simples parmi les filtres d’ordre. Comme son nom l'indique, le filtre médian calcule une médiane à l’intérieur d’une fenêtre de dimension mxn, pour chaque nouveau pixel, sa valeur après filtrage est la médiane des valeurs de son voisinage (Chandrakala, 2016).
Dans ce cas, nous avons choisi une fenêtre de taille 5x5 pour filtrer le bruit résiduel (Fig. 5.a.). Nous pouvons constater que la qualité de la section est relativement améliorée, le filtre médian permet de lisser l'image, mais il conserve mieux la netteté des réflecteurs.
Filtre gaussien. Comme son nom l’indique, le filtre gaussien possède un noyau de convolution de type gaussien, il fait partie des filtres linéaires (Solomon & Breckon, 2011).
Cependant les coefficients du filtre gaussien sont calculés par la loi suivante:
g (x,y) est le pixel de coordonnées x, y ; σ est l’écart-type.
Le choix de la taille du filtre gaussien est gouverné par le paramètre σ. En général, un filtre gaussien dont σ < 1, est utilisé pour atténuer le bruit. Plus l’écart-type croit, plus l’image devient floue.
Le filtre gaussien a été appliqué pour la réduction du bruit résiduel de la section présentée par la Fig. 3.b et le résultat du filtrage est illustré par la Fig. 5.b, sur laquelle nous pouvons observer aisément la bonne continuité des horizons sismiques.
Comparaison des spectres. L’analyse spectrale de Fourier d’une image quelconque simplifie les calculs en convertissant des opérations complexes de convolution dans le domaine spatial en une multiplication simple dans le domaine de fréquentiel.
L’image en deux dimensions est généralement non périodique, mais elle est supposée périodique quand on veut calculer sa transformée de Fourier discrète (Mahmood et al., 2015). La Fig. 6 montre la distribution spatiale de la magnitude du spectre des différents images de la section brute et des sections filtrées, nous pouvons aisément remarquer que l’amplitude du spectre varie d’un cas à un autre. La Fig. 6.a représenté le spectre en deux dimensions de la section sismique brute alors que la Fig. 6.b illustre son spectre après filtrage par le filtre SWNA. Dans ce cas, on constate la présence de faibles amplitudes en couleur bleue à cause de l’atténuation de l’énergie du bruit. Les Figs 6.c, 6.d et 6.e montrent les spectres en trois dimensions de la section brute filtrée, respectivement par les filtre SWNA, médian et gaussien.
4. Conclusion
La présente étude s’est accomplie par des résultats encourageants. Concernant l’atténuation du ground roll, nous avons testé la capacité du filtre Surface Wave Noise Attenuation sur des données sismiques synthétiques et sommées en couverture multiple. Le recours à la métrique RMS a permis de constater l’atténuation du degré du bruit après l’opération du filtrage. Le bruit résiduel a été atténué par l’utilisation des filtres médian et gaussien, ce qui indique que le filtre Surface Wave Noise Attenuation a ses limites concernant sa capacité de filtrage. La comparaison des spectres 2D et 3D des sections sismiques issues des différents filtres, nous a permis de mieux comprendre le phénomène d’atténuation du bruit.
Selon la qualité de l’image, les filtres médian et gaussien donnent un meilleur résultat sur le caractère de préservation des bords et contours (réflexions) conduisant à une bonne qualité de l’image sismique après filtrage.